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Un Européen au secours des pommes de terre chinoises

Par CHEN WEIHUA

Transport de pommes de terre à maturation précoce dans le comté de Qianxi, dans la province du Guizhou. ZHOU XUNCHAO / FOR CHINA DAILY

Transport de pommes de terre à maturation précoce dans le comté de Qianxi, dans la province du Guizhou. ZHOU XUNCHAO / FOR CHINA DAILY

Un agronome belge a contribué à la mise en place d’un système de protection des récoltes contre un fléau dévastateur et, ce faisant, assisté à la transformation d’un pays.

François Serneels s’est captivé pour la Chine à la lecture du Lotus bleu de son compatriote Hergé, l’auteur de bandes dessinées belge rendu célèbre par sa série des Aventures de Tintin. Le Lotus était le premier livre qu’il avait lu sur la Chine. « Visiter la Chine, c’était un rêve d’enfance », dit M. Serneels, responsable de la qualité et de l’environnement au Centre pour l’agronomie et l’agro-industrie de la province de Hainaut (précédemment dénommé Centre agronomique de recherches appliquées du Hainaut ou CARAH). Son premier voyage en Asie tant attendu se présenta pendant sa deuxième année d’études universitaires en 1980, année où il visita l’Inde ; puis, en 1984, il se rendit en Thaïlande pour un séjour de travail de deux ans, et il se dit alors qu’il était à mi-chemin de la Chine. Pour autant, ce n’est pas avant 15 années plus tard qu’il allait mettre le pied dans ce pays.

François Serneels bavardant avec son ami et partenaire chinois de longue date, Che Xingbi, lors d’un voyage dans la province du Gansu. PROVIDED TO CHINA DAILY

François Serneels bavardant avec son ami et partenaire chinois de longue date, Che Xingbi, lors d’un voyage dans la province du Gansu. PROVIDED TO CHINA DAILY

M. Serneels, qui a pris 64 ans le 26 décembre, s’est rendu dans le pays plus de 60 fois dans le cadre d’échanges en matière de technologie agricole, et plus particulièrement dans le but d’aider les agriculteurs chinois à combattre le mildiou de la pomme de terre. Tout a commencé quand il est tombé en 1999 sur une annonce dans une revue agricole belge concernant la constitution d’une délégation de la région wallonne pour assister à une exposition agricole internationale, en Chine. Il apprit par hasard qu’une conférence internationale sur la protection des végétaux s’y tiendrait une semaine plus tôt ; il lui parut donc idéal de participer aux deux manifestations, le billet d’avion et les chambres d’hôtel étant pris en charge. Alors directeur d’une ferme-école du CARAH, M. Serneels présenta la technique d’un système d’alerte précoce visant à contrôler le mildiou de la pomme de terre, une maladie grave capable de causer d’énormes pertes en production et en qualité affectant la récolte des pommes de terre en Chine et dans beaucoup d’autres pays en développement. « À ma surprise, de nombreux agronomes chinois se montrèrent très intéressés », relate M. Serneels, qui réalisa alors qu’il avait eu tort de penser que la pomme de terre était une denrée de base uniquement occidentale. En fait, la Chine était – et demeure – le plus gros producteur mondial de pommes de terre. La plupart sont cultivées en Asie, note-t-il. La Chine en produit plus de 90 millions de tonnes métriques par an, soit environ un quart du total mondial.

François Serneels en visite dans un champ de pommes de terre dans le Gansu. PROVIDED TO CHINA DAILY

François Serneels en visite dans un champ de pommes de terre dans le Gansu. PROVIDED TO CHINA DAILY

M. Serneels établit quelques contacts en Chine lors de son premier voyage et au bout de quelques mois, il commença à recevoir des délégations chinoises en Belgique. Quelques mois plus tard, il fit son deuxième voyage en Chine, qui le conduisit dans une zone rurale éloignée, à Chongqing dans le sud-ouest de la Chine à une époque où certains agriculteurs se lançaient là dans la culture des pommes de terre, destinée à devenir leur nouvelle production, mais où le mildiou qui détruit les plants était un grave problème. Avec un nouvel ami chinois, Che Xingbi, un agronome de Chongqing, M. Serneels commença à faire connaître et installer un système d’alerte précoce contre le mildiou de la pomme de terre. Aujourd’hui, ce système couvre plus de 14 provinces chinoises permettant de prévenir le mildiou et d’augmenter le rendement. M. Serneels s’estime particulièrement chanceux d’avoir M. Chen comme ami et collègue. Cela fait maintenant plus de 20 ans que les deux hommes communiquent l’un avec l’autre chaque semaine. Au cours des 20 dernières années, M. Serneels a fait de fréquents voyages en Chine, parfois trois ou quatre par an, emmenant avec lui d’autres agronomes belges ainsi que ses étudiants. Il se consacre à la formation de techniciens chinois locaux à l’usage du système d’alerte précoce contre le mildiou, ainsi qu’aux dernières techniques afférentes à la culture de la pomme de terre. Il se dit incapable de parler pour toute la Chine, mais dans les régions où il s’est rendu, il a pu voir que l’on prêtait une grande attention à cette culture. Il estime que les agriculteurs sont aujourd’hui plus enclins à investir dans ce domaine grâce à leur capacité nouvellement acquise de contrôler le mildiou. Pour sa contribution exceptionnelle, M. Serneels s’est vu attribuer le prix de l’amitié de Chongqing (Chongqing Friendship Award) en 2015. En 2018, il a été désigné comme « l’un des 40 experts étrangers les plus influents au cours des 40 années de la réforme et de l’ouverture de la Chine ». À l’ambassade de Chine à Bruxelles en novembre 2022, il a reçu le prix de l’amitié du gouvernement chinois (Chinese Government Friendship Award). Deux de ses compatriotes ont également reçu ce prix : Johan Erauw, professeur de droit émérite à l’université de Gand, et Jacques Crommen, professeur émérite à l’université de Liège connu pour ses travaux sur la médecine traditionnelle chinoise.

Des cultivateurs avec une partie de leur récolte automnale de pommes de terre dans le comté de Luliang, à Qujing, dans la province du Yunnan. WANG YONG / FOR CHINA DAILY

Des cultivateurs avec une partie de leur récolte automnale de pommes de terre dans le comté de Luliang, à Qujing, dans la province du Yunnan. WANG YONG / FOR CHINA DAILY

Au long des années de sa contribution à la lutte contre le mildiou, M. Serneels a été témoin de la transformation qu’a traversée la Chine. La charrue tirée par des bisons dans les champs des fermes, une scène omniprésente quand il a visité le pays pour la première fois, ne se trouve pas facilement ces jours-ci, dit-il, car les bisons ont été remplacés par des microtracteurs. Il se souvient aussi qu’il y a 20 ans, les lumières étaient la seule chose qui consommait de l’électricité chez les agriculteurs. Dans les fermes aujourd’hui, chaque foyer est équipé de multiples appareils ménagers qui rendent la vie plus confortable, depuis les ventilateurs et les réfrigérateurs jusqu’aux téléviseurs et aux ordinateurs.