Un axe central au cœur du charme de Pékin
Par CHENG YUEZHU

Vue plongeante de la section principale de l’Axe central de Beijing, qui traverse le cœur de la capitale sur 7,8 kilomètres du nord au sud. PROVIDED BY BEIJING MUNICIPAL OFFICE FOR CONSERVATION AND MANAGEMENT OF BEIJING CENTRAL AXIS TO CHINA DAILY
Un ensemble de monuments représentant la colonne vertébrale de la capitale, conçu il y a des siècles, joue encore un rôle vital dans la vie moderne de la cité.
Il est souvent recommandé aux visiteurs du centre de Pékin de monter sur la colline Jingshan (au parc Jingshan) qui offre une vue plongeante sur la vieille ville de la capitale. Du sommet on découvre un aperçu panoramique de la Cité interdite rendue sublime par le décor de ses palais vermillon et jaune impérial. En se tournant face au nord, on remarque plus facilement l’équilibre de la symétrie enracinée dans l’esthétique traditionnelle et les croyances chinoises – la salle de la Longévité impériale se dressant tel une halte dans la descente et, au-delà, les rues intérieures et extérieures du quartier de Di’anmen coupant la vue en deux, le spectacle se prolongeant jusqu’aux tours du Tambour et de la Cloche.
On retrouve un tel équilibre structurel dans toute la vieille ville de Pékin, depuis la Porte de Yongdingmen au sud jusqu’aux tours du Tambour et de la Cloche au nord en traversant le complexe de la place Tian’anmen et la Cité interdite sur une distance totale de 7,8 kilomètres. Tel est l’Axe central de Beijing, vanté comme « la colonne vertébrale » de la capitale. Il correspond à un ensemble de complexes immobiliers et de sites archéologiques qui détermine l’agencement général de la ville, englobant les palais et jardins impériaux, les bâtiments sacrificiels impériaux, les ateliers de la vieille ville, les bâtiments nationaux à usage public ou cérémoniel, ainsi que les vestiges des routes de l’axe central.

Les monuments historiques le long de l’Axe central comprennent, de gauche à droite, la Cité interdite, l’Autel de la Terre et du Grain, la rue Qianmen, le Temple du Ciel et la colline Jingshan. PHOTOS BY JIANG DONG / CHINA DAILY AND PROVIDED BY BEIJING MUNICIPAL OFFICE FOR CONSERVATION AND MANAGEMENT OF BEIJING CENTRAL AXIS
L’éminent architecte chinois et historien de l’architecture du pays Liang Sicheng (1901-1972) a écrit jadis que « l’ordonnancement exceptionnel et magnifique de Pékin est créé par cet Axe central ». Le 27 juillet dernier, lors de 46ème session du Comité du patrimoine mondial à New Delhi, en Inde, l’UNESCO a inscrit sur sa Liste du patrimoine mondial « L’Axe central de Beijing : un ensemble de constructions représentant l’Ordre idéal de la capitale chinoise ». L’inscription, qui porte sur un espace de 589 hectares, une zone tampon de 4 542 hectares et 15 composants, constitue le 59ème site chinois, et le huitième site pékinois, intégré au patrimoine mondial.
Selon Lyu Zhou, directeur du centre du patrimoine national à l’université Tsinghua, le concept de la planification de l’Axe central de Beijing a pour origine les idéaux philosophiques de neutralité et d’harmonie, mais aussi la tradition culturelle de « choisir le centre » inhérente à la civilisation chinoise. « Il représente une incarnation matérielle de la vision du monde traditionnelle de la Chine, de ses valeurs, de sa conception du temps et de l’espace, porteuses d’une forte signification symbolique », commente M. Lyu. Les concepts à l’œuvre derrière l’Axe central remontent au « Kaogongji » (le Livre des divers artisanats) écrit avant l’an 221 avant notre ère, qui détaille les principes de la planification de la capitale.
Sous la dynastie des Han de l’Ouest (206 avant notre ère-an 24 de notre ère), le livre a été redécouvert et incorporé à l’œuvre confucianiste classique « Zhouli » (Les Rites de Zhou) pour devenir la pensée confucianiste orthodoxe appliquée au modèle idéal de la « cité capitale ». La dynastie Yuan (1271-1368) a choisi au 13ème siècle le site qui est aujourd’hui Pékin pour y construire sa capitale, Dadu. Un point de repère a été désigné sur la rive orientale de ce qui est aujourd’hui le lac Shichahai, où la Plateforme centrale et la Tour centrale ont été installées. S’étendant vers le sud à partir de la Plateforme centrale, un axe préliminaire a été tracé sur lequel la cité palatiale a été construite. Avec la Plateforme centrale au milieu, une grille rectangulaire a été conçue pour fixer les limites de Dadu.
C’est entre 1406 et 1564 que, la construction des cités intérieures et extérieures de Pékin se poursuivant, l’Axe central a été formé sur une longueur totale de 7,8 kilomètres. Sur la base des directives prescrites dans le « Kaogongji », les anciens Chinois ont édifié les temples, les autels et les bâtiments gouvernementaux alignés sur l’Axe central ou symétriquement placés le long du chemin. Nombreux sont les bâtiments dont la situation est conforme aux indications figurant dans le livre, notamment « cour à l’avant, marché à l’arrière », ce qui correspond à la cour impériale, à la Cité interdite et aux marchés du côté des tours du Tambour et de la Cloche, ainsi qu’à « un temple ancestral à gauche, un autel de terre et de céréales à droite », renvoyant au Temple des ancêtres et à l’Autel de la Terre et du Grain, situés symétriquement sur les bords est et ouest de l’Axe central.
« À toutes les étapes de la construction de la ville, l’Axe central a déterminé le plan total de la cité et institué une conception symétrique », précise M. Lyu. Depuis 1978, les projets de préservation et de recherches archéologiques sur les sites patrimoniaux n’ont jamais cessé et le nombre de zones accessibles au public a progressivement augmenté. Les 12 années qui ont mené à l’inscription sur la liste de l’UNESCO ont vu la publication des documents concernant les mesures prises pour améliorer la préservation et la gestion des sites, l’entretien environnemental et la participation du public.
Zhao Yan, un habitant domicilié dans le hutong (l’allée) près de la rue intérieure Di’anmen, constate que « grâce aux efforts déployés en matière de préservation du patrimoine, la rue a progressivement retrouvé son ancienne splendeur. Aujourd’hui, elle regorge d’échoppes de chaque côté. Le soir, les jolis spectacles de lumière attirent les touristes chinois et étrangers. Le rue est devenue tellement dynamique ».
Article réalisé avec la collaboration de Wang Kaihao.