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Mobilisation pour un nouveau cycle de la conservation du patrimoine

Par FANG AIQING, WANG KAIHAO et MA JINGNA

Li Bo (à droite), un restaurateur chevronné de l’Académie de Dunhuang, examinant avec un collègue les peintures murales dans l’une des grottes de Yulin, dans le comté de Guazhou près de Dunhuang, dans la province du Gansu. JIANG DONG / CHINA DAILY

Li Bo (à droite), un restaurateur chevronné de l’Académie de Dunhuang, examinant avec un collègue les peintures murales dans l’une des grottes de Yulin, dans le comté de Guazhou près de Dunhuang, dans la province du Gansu. JIANG DONG / CHINA DAILY

L’esprit toujours visible de la continuité anime les générations qui se consacrent, les unes après les autres, à la protection de grottes placées sous le patronage de l’UNESCO.

C’est une course contre la montre qui voit, à l’Académie de Dunhuang, des générations d’architectes du patrimoine s’efforcer de préserver la beauté artistique des grottes de Mogao, un site du patrimoine mondial de l’UNESCO, face à l’érosion causée par le sable et le vent. Le restaurateur Li Bo fait partie de l’équipe qui se consacre à la protection de 45 000 mètres carrés de fresques et de plus de 2 400 sculptures dans les 735 grottes du site, dont la constitution s’est étendue sur un millénaire, du 4ème au 14ème siècle. Situés tout à l’ouest de la province du Gansu, dans le nord-ouest de la Chine, la ville de Dunhuang et ses environs – demeures des grottes de Mogao et d’autres monuments historiques témoins de la grande époque de l’ancienne et prospère Route de la soie – viennent de dérouler une saga attestant la communication établie entre diverses civilisations dans toute l’Eurasie. Un restaurateur de peintures murales aussi sophistiqué que M. Li, qui a accumulé plus de trente années de travail dans cette spécialité, ne peut traiter en une journée qu’une zone avoisinant la taille d’une feuille de papier.

Les trois dernières décennies l’ont vu remettre en état quelque 1 500 mètres carrés de fresques et plus de 300 sculptures – les plus petites ne faisant que 20 centimètres de haut et les plus grandes, plus de 20 mètres. Ces années de soins lui ont également valu le bonheur unique de dialoguer en silence avec les personnages des fresques chaque jour de travail. Devant une peinture murale du 10ème siècle représentant un large auditoire à l’écoute du Bouddha sur le site des grottes de Yulin, dans le comté de Guazhou à environ deux heures de route des grottes de Mogao, M. Li, en présentant son travail habituel, mime les expressions faciales des personnages. Le site, dont les archéologues estiment qu’il remonte à la dynastie des Wei du Nord (386-534), partage une cohérence culturelle et artistique avec les grottes de Mogao. L’Académie de Dunhuang supervise aussi les grottes de Yulin. Représentés de manière frappante sur la fresque, certains auditeurs se penchent légèrement en avant par soif de connaissance. Certains sont perplexes, d’autre regardent autour d’eux. Certains chuchotent dans des oreilles voisines, d’autres sommeillent.

Les grottes de Mogao à Dunhuang sont une destination prisée des touristes. WANG KAIHAO / CHINA DAILY

Les grottes de Mogao à Dunhuang sont une destination prisée des touristes. WANG KAIHAO / CHINA DAILY

« Cela me remplit de joie de penser que je contribue à leur survie et à l’héritage qu’ils transmettent », dit M. Li. Et d’ajouter qu’au fur et à mesure que sa connaissance grandit et que sa compréhension de ces œuvres d’art d’approfondit, il lui est encore plus insupportable de voir ses mains incapables de suivre son esprit, tel un docteur qui connaît la maladie dont souffre son patient sans parvenir à la traiter. Les « maladies » qui affectent généralement les peintures murales se manifestent par des fissures et des écailles, l’apparition de salpêtre provoquée par des changements de température et par l’humidité dans les grottes, ainsi que le dépôt de sels. La restauration d’une peinture murale exige des qualifications polyvalentes. Le restaurateur doit connaître la peinture, maîtriser la maçonnerie et avoir des connaissances de chimie et de physique, afin d’être capable de reconnaître les problèmes, d’en identifier les causes correspondantes et d’apporter une solution. Il doit aussi choisir les matériaux et les outils adéquats, puis faire des essais avant d’exécuter la restauration proprement dite et d’en évaluer les effets après coup. Le restaurateur doit respecter l’œuvre originelle et viser à maintenir les fresques en l’état plutôt que de les repeindre, souligne M. Li, dont la carrière témoigne et profite de l’évolution de la mission de l’académie, depuis la sauvegarde du patrimoine culturel jusqu’à la préservation scientifique et préventive, en passant par les progrès réalisés tant dans la recherche que la mise en œuvre de mesures de conservation. Les réalisations interdisciplinaires, telles que les découvertes actualisées en matière de science des matériaux et les nouvelles technologies numériques, ont grandement facilité le travail des restaurateurs.

Un restaurateur de l’Académie de Dunhuang au travail sur des peintures murales de la grotte 55 de Mogao remontant au 10ème siècle. WANG KAIHAO / CHINA DAILY

Un restaurateur de l’Académie de Dunhuang au travail sur des peintures murales de la grotte 55 de Mogao remontant au 10ème siècle. WANG KAIHAO / CHINA DAILY

Selon Guo Qinglin, directeur adjoint de l’académie chargé de la conservation du patrimoine culturel, plus de 150 architectes du patrimoine et restaurateurs issus de l’académie travaillent désormais sur la ligne de front, se consacrant aux grottes. Forts des riches expériences engrangées par l’Académie de Dunhuang au cours des dernières décennies, ses architectes participent à des projets de préservation de sites du patrimoine en terre et de peintures murales dans 20 régions administratives de niveau provincial dans tout le pays. Ils fournissent aussi des solutions à des sites semblables dans d’autres pays tels que le Kirghizistan et le Myanmar, selon M. Guo. Les grottes de Mogao existent depuis plus de 1 000 ans. Quelle que soit la somme des efforts que dépensent leurs gardiens et leurs restaurateurs, que ce soit en matière de conservation ou de tentatives de rétention des dunes de sable voisines, tout le monde doit admettre ce simple fait : on ne peut que ralentir le vieillissement des grottes, on ne peut l’arrêter. « C’est ainsi que le changement climatique est un facteur majeur qui affecte les peintures murales dans les grottes », fait remarquer Su Bomin, directeur de l’Académie de Dunhuang : « La préservation des grottes nécessite une recherche à long terme, sur une durée beaucoup plus longue qui va bien au-delà de notre durée de vie ».

Article réalisé avec la collaboration de Wang Jiahui.