Les entreprises rivalisent d’innovation pour introduire des « humains numériques » dans beaucoup de domaines.
Dans une banque de Shanghai, une réceptionniste élégamment habillée accueille les clients. S’assurant qu’ils sont de bonne humeur, elle devient bavarde et présente toute une gamme de services offerts par la banque. Consciente que certains clients froncent les sourcils, elle devient plus réservée et se contente de répondre aux questions qu’on lui pose, par exemple sur le moyen d’imprimer des relevés bancaires détaillés. La réceptionniste a été la première employée numérique à l’agence de Shanghai de la banque de Ningbo. Sur un écran d’une hauteur égale à celle d’un être humain ordinaire, elle peut répondre à plus de 550 questions courantes sur les affaires bancaires et à plus de 3 000 requêtes supplémentaires.
Alimentée par un système d’intelligence artificielle, elle peut apprendre à répondre à 50 nouvelles questions par jour et, à l’aide d’une caméra sur l’écran, elle peut aussi dire si les clients sourient ou non, explique Luan Qing, directrice générale du secteur de la culture numérique et des loisirs chez SenseTime, qui a mis au point la technologie numérique humaine. L’employée numérique offre un aperçu des secteurs en nombre grandissant qui commencent à adopter des humains numériques mus par l’intelligence artificielle pour accroître l’efficacité et améliorer la communication avec les clients. La rapidité des progrès technologiques permet aux humains virtuels, qui ne se voyaient que dans le secteur des spectacles où se brassent d’importantes liquidités, tels que les films, de devenir de plus en plus fréquents dans la vie quotidienne des gens, notamment dans le travail, selon des experts et des dirigeants d’entreprises.
Depuis les présentateurs virtuels qui diffusent des informations 24 heures sur 24 jusqu’aux danseurs et chanteurs virtuels qui attirent des admirateurs dans le monde entier, les humains numériques se font plus intelligents. Ils illustrent l’orientation des jeunes pousses et des poids lourds de l’économie chinoise vers le recours à des êtres virtuels dans un plus grand éventail d’applications, estiment les spécialistes et les entrepreneurs. Pendant les Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de Pékin en février dernier, une vingtaine d’humains numériques ont fait leurs débuts et joué différents rôles : distribution auprès des malentendants de guides expliquant les compétitions par le langage des signes à l’aide de l’intelligence artificielle ; présentation de la météo ; prestations d’un ambassadeur de l’assistance au public ; et diffusion vidéo de présentateurs vendant des souvenirs des Jeux d’hiver en ligne. En Chine, plus de 280 000 entreprises ont des activités commerciales en lien avec les humains numériques, les sociétés enregistrées au cours des cinq dernières années affichant un taux de croissance annuelle composé de près de 60%, indique Qichacha, une firme spécialisée dans le suivi des enregistrements commerciaux.
CHEN YUYU / FOR CHINA DAILY
Avec la mise au point et l’intégration de l’intelligence artificielle, de la réalité virtuelle, du rendu de haute précision et d’autres technologies, les humains numériques se rapprochent des humains tout court, depuis l’image, l’expression faciale, la posture et les gestes jusqu’au discours, la sémantique et la voix qui accentuent leur résonance auprès des gens, estime Mme Luan, de SenseTime. « L’intelligence artificielle aidant, au fur et au mesure que le mode de production et le fonctionnement des humains numériques sont de plus en plus automatisés, et que les coûts de production baissent, ces humains numériques vont probablement s’introduire dans d’autres secteurs tels que la finance, le commerce de détail, la gouvernance et l’automobile », ajoute-t-elle. L’an dernier, le marché des célébrités virtuelles a représenté en Chine 6,22 milliards de yuan (871,4 millions d’euros), soit près de 80% de plus qu’en 2020. Il devrait atteindre 20 milliards de yuan au cours des deux prochaines années, selon un rapport établi par le cabinet d’étude de marché iiMedia. Pour Pan Helin, doyen exécutif de l’institut de recherche en économie numérique à l’université d’économie et de droit de Zhongnan à Wuhan, le plus gros obstacle à une application à grande échelle des humains virtuels, c’est la technologie, car il est difficile à ces humains virtuels d’exécuter efficacement des tâches dans des contextes compliqués.